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Histoire & Patrimoine en Haut Berry Giennois
15 janvier 2013

La Vierge à l'Enfant de Saint-Brisson-sur-Loire

Saint Brisson, église et vierge XVIe restaurée 009

Eglise de Saint-Brisson-sur-Loire, la Vierge à l'Enfant éclairée par le vitrail d'axe du choeur.

Depuis quelques années, l'église de Saint-Brisson-sur-Loire conserve une intéressante Vierge à l'Enfant. Retirée de la niche qu'elle occupait sur la petite place Croslin, niche qui avait été réaménagée pour l'accueillir suite à la disparition du bâtiment portant sa niche d'origine dans les années 1990 et dans laquelle elle se dégradait de plus en plus, la statue, après une minutieuse restauration fut placée au milieu des années 2000 sur le maître-autel de l'église Saint-Pierre-et-Saint-Brice.

Son histoire est trouble. Selon certains, elle serait apparue dans le village au cours du XVIIIe siècle. Pourtant, et si tant est que ce fût vrai, aucun document authentique ne venant nous renseigner d'une quelconque manière quant au passé de cet objet, il est très clair qu'il ne s'agit pas d'une création des années 1700 mais bien plutôt d'une oeuvre à situer entre le milieu du XVIe siècle et le premier tiers du XVIIe et qui semble marquée par le courant maniériste.

En dépit de décennies, probablement même de siècles passés exposée aux intempéries, l'oeuvre, réalisée dans une pierre calcaire tendre a conservé une grande partie de sa polychromie, révélée par la restauration. La Vierge, qui se présente de trois quarts, pied droit et jambe droite en avant, genou fléchi, tient dans ses bras l'enfant Jésus. Elle a le teint rose, les yeux légèrement soulignés de noir et de longs cheveux blonds ondulent dans sa nuque. Elle est habillée d'une grande robe bleu clair parsemée de petites fleurs dorées et est enveloppée dans un important manteau d'un bleu plus foncé. Un voile de même couleur que sa robe, souligné d'un liseré doré couvre en partie sa chevelure.

 

Saint Brisson, église et vierge XVIe restaurée 014

La Vierge à l'Enfant de l'église de Saint-Brisson vue depuis la gauche du maître-autel.

 

Mais c'est la figure de l'enfant Jésus que la Vierge tient dans ses bras qui retient l'attention. En effet, outre une disproportion criante entre la mère et l'enfant, ce dernier tout poupon qu'il soit présentant à tout le moins un beau gabarit est dans une position que nul ne lui envierait. En effet, alors que son bassin est tourné dans le sens du regard de sa mère, l'enfant quant à lui qui porte le globe serré dans ses mains regarde en direction de la gauche, le corps tourné à plus de 45 degrés au-dessus du bassin. 

 

Saint Brisson, église et vierge XVIe restaurée 007

La Vierge à l'Enfant vue de face en légère contreplongée.

 

Saint Brisson, église et vierge XVIe restaurée 013

L'enfant Jésus dans son inconfortable position vu depuis la droite du maître-autel.

 

On dit les nouveaux-nés très souples mais celui-ci bat des records ! Bien que la statue ait connu plusieurs restaurations au fils des ans il semble bien que cette position "abracadabrantesque", pour citer un retraité célèbre, du buste de l'enfant soit d'origine. Associée à la disproportion du corps de l'enfant par rapport à celui de sa mère, cette oeuvre paraît bien devoir être classée dans les productions issues du courant maniériste introduit en France durant le second tiers du XVIe siècle, notamment à Fontainebleau par Rosso Fiorentino. 

Les fleurs aux pétales dorés que présente la robe de la Vierge auraient peut-être été rajoutées dans un deuxième mouvement au cours du premier tiers du XVIIe siècle. Il pourrait s'agir en effet de fleurs de lys stylisées, Louis XIII qui ne parvenait pas à obtenir un héritier avait en effet placé le royaume sous la protection de la Vierge. Rappelons effectivement que Louis XIV naquit en 1638, cinq ans avant la mort de son père et plus de 20 ans après le mariage d'Anne d'Autriche et Louis XIII qui se détestaient par ailleurs cordialement et vécurent séparés une grande partie de leur existence. L'héritier qu'on espérait plus fut surnommé "l'enfant du miracle" pour cette raison. 

 

Saint Brisson, église et vierge XVIe restaurée 018

Eglise Saint-Pierre-et-Saint-Brice, la Vierge vue de dos.

 

Saint Brisson, église et vierge XVIe restaurée 022

La Vierge et l'Enfant vus en contreplongée depuis la droite du maître-autel.


Si elle ne fut pas faite au départ pour la niche qui l'accueillit durant des décennies comme on le prétend, alors d'où vint cette étonnante petite statue ? La débat restera longtemps ouvert. Appartenait-elle à la chapelle du château de Saint-Brisson, détruite en 1793 ? Fut-elle volée dans un édifice religieux des environs ? Le nom de la chapelle Saint-Nicolas, petit édifice qui se dressait autrefois à l'extrémité sud du pont de Gien, dans  le quartier du Berry, a été évoqué sans pour autant qu'aucune preuve de cette provenance ait été apportée. 

Un élément semblerait plaider en faveur d'un objet déplacé de son lieu d'implantation originel: la divergence de direction des regards de la Vierge et de son fils. Il n'est pas impossible que cette curieuse posture ait été donnée par le sculpteur à l'Enfant tant pour des questions stylistiques que pratiques, chacun des deux personnages regardant peut-être dans son environnement d'origine quelque élément précis qu'il est impossible d'imaginer aujourd'hui.

La Vierge à l'Enfant de Saint-Brisson-sur-Loire gardera sans doute encore longtemps son mystère.

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