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Histoire & Patrimoine en Haut Berry Giennois
5 avril 2010

La saison des amours est arrivée!

avril_1_

Après les fastes de la cour, la vie et le labeur des sujets du duc, le calendrier des frères de Limbourg nous présente l’installation d’un printemps placé sous le signe de l’amour courtois, Moyen Age oblige.

Après un hiver assez terne, les couleurs vives sont de retour dans la composition ; elles soulignent autant le retour du soleil et du foisonnement coloré de la nature environnante que la puissance du commanditaire.

Le premier plan, divisé en trois parties, présente du côté gauche une scène galante tandis que la partie centrale est consacrée à la cueillette des fleurs qui éclosent un peu partout en ce mois d’avril ; enfin la partie droite est occupée par un haut bâtiment couronné d’un crénelage et précédant un verger.

Cinq personnages forment le groupe de la partie gauche. Le couple principal dans lequel il faut probablement reconnaître Charles d’Orléans et Bonne d’Armagnac, petite-fille de Jean de Berry échangent un anneau, évocation de leurs fiançailles célébrées le 18 avril 1410… à Gien !

Les personnages sont ici hiérarchisés. Charles d’Orléans se détache ainsi du groupe par son vêtement, d’un bleu éclatant et semé de couronnes stylisées, allusion à son rang princier. Le bleu détrône désormais la pourpre, en vogue depuis l’époque romaine dans les hautes sphères de la société chez les laïques. Les différentes nuances du rouge, le vert, le blanc et le jaune sont également en vogue mais le bleu est de loin la couleur la plus raffinée et la plus prisée qui permet ici de reconnaître au premier coup d’œil le personnage le plus important de la miniature.

On note ici le remarquable travail réalisé par l’artiste pour mettre en valeur et retranscrire les expressions des personnages. L’amoureux regarde affectueusement sa belle qui baisse les yeux comme l’exigent les convenances. Etonnamment il est fait peu de cas chez la plupart des observateurs des deux témoins présents à leurs côtés dont la pose et les regards qu’ils échangent, emplis de tendresse, en disent long sur les sentiments qui les lient l’un à l’autre.

Plus petit que les quatre autres personnages et en marge de la scène, un fou égaye le tableau.

Le centre de ce premier plan est occupé par deux suivantes, affairées à la cueillette de fleurs, comme l’arrivée du printemps y invite. On remarque dans cette miniature que le costume masculin, certes encore fait de tissus longs et amples se distingue désormais nettement de son homologue féminin. Coupes, chapeaux et coiffures sont à la mode du temps ce qui forme visuellement un marqueur social. La houppelande portée par la femme en rose notamment apparaît vers 1390 et sera en usage jusque vers 1440. Contrairement à celle que portent les hommes, la houppelande féminine n’est pas ouverte sur le devant ni fendue latéralement et la ceinture, nouée dans le dos se porte haut, juste sous les seins. Les cheveux sont coiffés vers l’arrière, tirés ou lâches dans le dos, dégageant les oreilles et le front, une mode qui s’accentuera encore à la Renaissance.

Dans le tiers droit de l’image se trouve la représentation du verger seigneurial. Clos de murs il est pourtant situé en dehors de l’enceinte du château comme le veut l’usage. Il lui procure des fruits, ainsi que des légumes grâce aux carrés de potager, sans oublier les herbes aromatiques et les plantes textiles et médicinales. Le verger est à la fois un garde-manger et une pharmacie pour son propriétaire.

Enfin l’arrière plan, le sommet de la miniature est, comme à l’accoutumée occupé par un château. Ici les auteurs ne sont pas unanimes quant à son identité, s’agit-il de Dourdan, détruit en 1411 ou du château de Pierrefonds, propriété de Louis d’Orléans, frère du roi Charles VI et père de Charles, notre amoureux à la bague et personnage principal en ce mois d’avril ?

En tout cas voilà un couple princier pour qui le Haut Berry Giennois n’était pas terra icognita, ils avaient au minimum eu tout loisir d’en admirer les rives depuis les hauteurs de Gien en ce 18 avril 1410 qui scella leurs fiançailles. Une question demeure : ont-ils eu beau temps ?  En avril dans le giennois… rien n’est moins sûr…

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